Bruxelles, un exemple d’éthique pour la France ?
Alors que le gouvernement français est embourbé dans d’embarrassantes affaires de conflits d’intérêts, ça bouge à Bruxelles. En deux semaines, deux initiatives ont été proposées pour améliorer la transparence européenne. De quoi donner quelques idées à la France.
Un ministre de la République peut-il accepter des cadeaux ou avantages d’hommes d’affaires ou de dirigeants respectant assez peu les critères démocratiques ? En Suède la réponse est claire : le ministre doit démissionner dans l’heure. En France, la question se pose toujours.
Souvent accusée de collusions avec les pouvoirs économiques et financiers, l’Union européenne tente de son côté de devenir plus transparente et d’améliorer l’éthique de ses anciens dirigeants. En 1999, le scandale provoqué par les soupçons de malversations de la Commission Santer, notamment un emploi fictif fourni à son dentiste par la Commissaire française Edith Cresson, avait conduit tous les Commissaires à la démission, suite aux révélations de la presse. Et depuis, si le Berlaymont (ndla: bâtiment de la Commission) est surveillé, peu de mesures concrètes ont été mises en avant.
Nouveau code de conduite
La Commission européenne vient ainsi de présenter un rapport au Parlement européen dans lequel elle émet des propositions en vue de réformer le code de conduite de ses Commissaires.
Pour éviter que d’autres conflits d’intérêts ne se développent, de nouvelles règles seront bientôt mises en place. Le document de travail a été dévoilé par l’ONG Alter-EU. Parmi les propositions, l’interdiction pour les anciens commissaires de travailler pour des lobbys ou des cabinets de consultants dans les 18 mois après la fin de leur mandat.
Plusieurs cas avaient défrayés la chronique, comme celui de l’irlandais Charlie McCreevy. Alors qu’il était en charge de la concurrence jusqu’en 2010 dans la Commission Barroso I, il est désormais associé chez Ryanair, la célèbre compagnie lowcost. Durant son mandat, il était notamment en charge du dossier qui interdisait à son nouvel employeur de racheter son concurrent, Aer Lingus. Coïncidence ?
D’autant plus que les anciens dirigeants de la Commission continuent à percevoir une indemnisation de la part de l’UE, jusqu’à trois ans après leur fin de mandant. Une sorte de “RSA doré”. Toutefois, le nouveau texte ne définit par clairement ce qu’est un “lobby”, ni un “conflit d’intérêts”, ce qui pourrait permettre des interprétations larges et au cas par cas.
La règlement prévoit également d’interdire d’accepter tout cadeau de plus de 150 euros (tout comme l’a demandé Nicolas Sarkozy suite aux polémiques créées par les vacances à moindres frais de ses ministres), à moins que cela ne rentre dans un cadre protocolaire, auquel cas les Commissaires devraient prévenir les services compétents. De plus, les Commissaires européens ne pourront accepter aucune invitation dépassant le cadre de la “courtoisie” et des “usages diplomatiques“.
Un “Greenpeace de la finance”
Le Parlement européen a exprimé son soutien à une réforme stricte du code de conduite des Commissaires. Et cela bouge aussi dans les rangs du Parlement européen. Un groupe de députés, toutes tendances confondues, cherche à concrétiser une initiative intitulé “Finance Watch”. L’objectif est de mettre sur pied un “Greepeace de la finance“.
Le projet, dans les tuyaux depuis 2010, est sur le point d’aboutir. Le soutien dépasse même le cadre européen, puisque nombre d’élus nationaux ont aussi signé l’appel. En France, on cite les noms de Yves Cochet (France, Verts, député de Paris) ou Henri Emmanuelli (France, Parti socialiste, Député des Landes).
Reste encore à trouver 2 millions d’euros pour permettre à la structure de travailler. Pour cela, des associations, ONG, centres de recherches et syndicats sont sollicités pour mettre la main à la poche. L’apparition de ce nouvel acteur indépendant au sein de la balbutiante société civile européenne permettrait ainsi, peut être, de contre-balancer l’influence des lobbys financés par les institutions bancaires elles-mêmes.